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Patagonie, épisode 2 : Des montagnes sans nombre

valentin-lebrat Par Le 18/02/2017 9

Hola'la ! Catchai Po ? (En Chilien dans le texte)
Les mauvaises langues diront que le deuxième épisode est une copie du premier, et ils n'auront pas tout à fait tort.
Les éléments qui ont fait le succès du premier volet sont toujours là : les volcans enneigés, les parois de granite, les fjords et la forêt luxuriante. Mais regardez bien, il y a quelques nouveautés...


De Chaiten à Villa Santa Lucia
La carretera Australe  fut construite il y a une cinquantaine d'années par le régime militaire de Pinochet, pour désenclaver les régions du Sud. Un chemin de terre à la base, jusqu'il y a 6 ans, et qui va être entièrement asphalté d'ici 2025. J'alterne donc les portions de route, de pistes et de travaux, en particulier sur cette section.
Depuis Chaiten, je quitte l'océan pour m'engager dans une vallée parallèle. Devant moi, les falaises et la langue glaciaire du glacier Yelcho, derrière moi l'interminable calotte du volcan Michinmahuida. Après être passé sans m'arrêter devant une petite dizaine de sources thermales, je décide de profiter au moins une fois des eaux chaudes façon patagone, dans un petit vallon au coeur de la forêt. Disfrutando.
J'arrive bientôt au bord du Lac Yelcho, une autre merveille logée dans les montagnes. Une petite nuit dans la forêt sombre, envahie de limaces, et je repars plein Sud pour Villa Santa Lucia, que j'atteindrai rapidement après avoir passé un petit col vers 500m d'altitude. Je traverse ici des régions qui furent explorées et colonisées très récemment, entre les années 1910 et 1940, principalement par des allemands aventureux et des habitants de la proche île de Chiloe qui se joignirent à eux.
Villa Santa Lucia est un petit croisement, car d'ici part une route vers l'intérieur des terres qui donne accès à deux villages frontaliers. Je décide de tenter l'aventure vers l'un d'entre eux, pour découvrir à quoi ressemble la cordillère par là- bas. Je laisse donc mon vélo à Villa Santa Lucia, et décroche mes bâtons de marche et ma tente de mon porte- bagage.

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Une muraille de Granite qui me protège de la mer, et derrière laquelle se cache le volcan Corcovado

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L'interminable glacier du volcan Michinmahuida

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Le glacier Yelcho

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Et le lac Yelcho


Dans les yeux du condor
Dans le petit bus qui me dirige vers Palena, je sors petit à petit de la forêt sempervirente et des montagnes abruptes, pour trouver des prés, des forêts plus "européennes", des vallées plus larges et des sommets plus modestes. La géologie change un peu vers la frontière, c'en est fini du "tout" granite, et je retrouve des roches un peu moins nobles, ce qui ne manque pas de changer la physionomie des montagnes.
A Palena, je respire déjà à l'Argentine. L'accent de la langue, à couper au couteau, les vaches et les taureaux dans les prés, les hommes avec leur pantalon rentré dans leurs longues bottes de gauchos, un pull et un béret posé de travers à la façon maquisarde pour compléter le costume. Ils se déplacent souvent à cheval, même les ados. La classe.
Je m' embarque sur une route de "trekking", qui s'avèrera être surtout adaptée pour la parcourir à cheval. C'est une partie de l'itinéraire qui relie deux communes de cette région- là des Andes, celles de Palena et de Lago Verde, en passant par le très reculé Lac Palena, que je compte atteindre avant de faire demi- tour. J'apprendrai en revenant, par un ancien du village, que c'était une route de transhumance dans les décennies passées, qui a été abandonnée et investie par une réserve forestière. Seulement, les gardes forestiers n'ont pas entretenu les sentiers d'antan, et je m'en rendrai compte bientôt.
Après une remontée de la vallée du Rio Azul sur 20 km, le sentier carrossable s'arrête et je dois trouver et suivre l'ancienne trace de transhumance. Les aléas de parcours me la font perdre bien vite, et je dois me résoudre à changer mes plans, reconnaissant que je n'aurai pas assez de ressources physiques et alimentaires pour atteindre le lac Palena. Je continuerai comme je peux sur les pentes au Sud de la vallée, en cherchant à prendre de la hauteur quand les conditions s'y prêteront , empruntant les sentiers de vaches. Fidèle à ma devise : "si la vache passe, Val passe" j'arrive difficilement à me frayer un chemin dans forêts et broussailles et me loger sur un promontoire à quelques encablures d'un petit sommet que je n'atteindrai malheureusement pas avant mon heure fixée de demi tour. Je ne pourrai pas par conséquent observer le lac par les hauteurs,  ainsi que le paysage plus au Sud, mais je profite d'une vue fantastique sur le fond sauvage de la vallée du Rio Azul, entourée d'un large chaînon de hautes montagnes enneigées. Mais ce jour là, j'avais rendez-vous avec plus qu'un simple paysage. L'heure avance, et le soleil commence à chauffer ces pentes Ouest sur lesquelles je me trouve, créant les courants ascendants nécessaires au vol des condors. Un premier couple vient me saluer, en tournoyant pas bien loin de moi, puis s'en va. Je commence ma redescente, et passe par hasard sur une large vire entre deux hautes falaises. Mais la falaise supérieure, je le comprendrai bien vite, est aussi le nid du couple que j'ai observé tout à l'heure. Rapidement, l'un des deux condors revient, tournant chaque fois un peu plus proche au dessus de ma tête. En continuant de marcher pour ne pas le déranger plus longtemps, je profite d'un ballet des plus spectaculaire. Sur ce promontoire au dessus de la vallée, dans un décor continu de hautes cimes rocheuses, tourne et retourne le Condor, de ses ailes interminables qu'il ne bat presque jamais. Tantôt en bas, tantôt en haut de moi, tantôt à l'aplomb - ce qui projette à quelques mètres de mes pieds son immense ombre - je peux observer son cou incliné vers le bas et sa tête tournée vers moi pour me surveiller. Il se dégage quelque chose de très puissant de ce spectacle, le genre de choses qui habite la mémoire pendant longtemps.

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Assez grande la marguerite. Et puis elle a une couleur bizarre.

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Dans la vallée du rio El Azul

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Une cime de l'Oisans, ou du moins sa petite soeur jumelle, s'est glissée sur cette photo. Saurez-vous la reconnaître ?

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La partie finale de la vallée, entièrement sauvage.

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El condor pasa... Son cou vers le bas, sa tête en arrière. "Les yeux dans les yeux"

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...Y pasa de nuevo, y de nuevo...

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Confluence des rios El Tigre et El Azul


Les glaciers toujours plus près
Retour à ma "Patagonie de la jungle" où je récupère mon vélo pour une longue route vers la capitale de la Patagonie Chilienne, Le petit bourg de Coyhaique.
Un long suivi des cours du Rio Frio, puis Palena me fait observer un défilé de cimes enneigées toutes plus belles les unes que les autres, avant d'arriver sur une plaine un peu plus large au niveau de La Junta, dominée au loin par le volcan Melimoyu surenneigé. (Exercice de prononciation : dites le nom du volcan à l'endroit, puis à l'envers, puis à l'endroit, puis...).
Je continue toujours plus au Sud pour arriver de nouveau au Pacifique, dans le fjord de Puyuhuapi aux belles eaux bleues. Colonisation allemande oblige, on y produit une bière locale qui vaut le détour. Dans une vallée qui débouche sur le fjord, se révèle soudainement les glaciers du chaînon Queulat. La grande calotte glaciaire qui occupe les hauteurs de ce massif granitique s'écoule par une langue glaciaire qui débouche sur cette vallée. Le glacier s'arrête net au dessus d'un immense cirque rocheux vertical, que franchit le torrent de fontes par un saut magistral de près de 300m de haut. L'ambiance est au rendez vous. A peine deux kilomètres après ce site, je retrouve la rive de l'océan duquel je ne m'étais pas vraiment éloigné, au bord du très tranquille fjord Queulat. La route est très fréquentée par les cyclistes et les "mochiladores", des chiliens entre 18 et 35 ans qui avancent en stop le long de cette route symbolique pour le pays. L'occasion pour moi de faire quelques kilomètres accompagné, exerçant selon la situation mon anglais, mon espagnol ou mon belge. Je grimpe un col bien raide au Sud du massif dont je parlais tout à l'heure, pour profiter d'une vue privilégiée en face des cimes glaciaires, à la façon "Lautaret", mais dans la jungle. A partir de là, je quitte l'océan pour avancer petit à petit dans les terres, et retrouver un peu les Andes plus sèches telles que je les avais rencontrées à Palena. Ca tombe bien, le temps se prépare à changer, le bel anticyclone qui me protégeait s'étant fait botter par le courant antarctique à la façon de S.Zaza tirant son penalty.
Encore une poignée de montagnes sorties de quelques imaginaires farfelus, une traversée d'un plateau façon Haute- Loire sur les hauteurs du Rio de l'empereur Guillaume, et me voilà débarqué à Coyhaique, pour quelques jours de repos et de meilleure bouffe.

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Retour sur le vélo, en route tout droit et plein Sud. Je quitte la région 10 des Lacs, pour rejoindre la région 11 de la "Patagonie Aysen".

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Un coin de rêve, la confluence des rios Frio et Palena, qui formeront désormais un petit fleuve

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Le cerro Barros Arana qui domine La Junta

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La petite plaine de la Junta. En direction de l'Océan, le volcan Melimoyu, dont la face Nord-Est a l'air parfaitement skiable en ce mois de février

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"C'est toujours la même eau qui coule" -Quand le vieux Magellan découvrit le détroit, il y avait des enfants qui s'y baignaient déjà

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Puyuhuapi au fond de son fjord

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A l'Ouest rien de nouveau...

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...à l'Est un glacier suspendu

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Parc National de Queulat

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Les fameuses tempêtes Patagones, les 40e rugissants, les 50e hurlants...

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C'est pas ici Tahiti, mais c'est toujours mieux que rien

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Le Sud du massif de Queulat, vu depuis la vallée...

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...et vu depuis mon premier col "officiel" en Patagonie, le Portezuelo Queulat.

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Quand tu te réveilles avec les courbatures de la veille, que tu fais 500m en vélo, et que tu vois le cerro Picacho.

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Le lac las Torres

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Et les "Torres" du lac

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La tête à l'envers, exactement. Je change le S par un N, et je pourrai être à Malissard, à Pelvoux...

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Far over, the misty mountain rise, leave us standing upon the heights

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Le temps change

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Quelques fleurs qui envahissent les champs dans cette région

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Péché par gourmandise

Le principal intéressé témoigne :

"La premier fois que j'ai essayé, c'était en Bolivie. Sans faire attention, j'avais acheté une petite boîte. Là bas, ça ne s'appelait pas comme ça en plus. Ils en vendaient incognito sous le nom de "Dulce de Leche" (tu te rappelles Tim ce lait concentré qui avait une couleur bizarre? ).

Et puis en arrivant au Chili, on a commencé à m'en proposer de partout. Au début, je me suis dit qu'un peu de temps en temps ne ferait pas de mal. Une tartine par ci, un Churros par là, ça ne fera pas de mal. Et puis j'ai commencé à glisser. Les tartines s'enchaînaient, ça ne me suffisait plus. Alors j'ai commencé avec tout ce qui me tombait sous la dent : avec un Cookie, un carreau de chocolat... Tout était un prétexte. C'est alors qu'on m'en a parlé.

Oui, je parle bien de la cuillère. Il ne m'a pas fallu longtemps pour m'y habituer, je ressentais toujours plus le manque. C'est quand mon vélo m'a dit "c'est ou moi, ou le Manjar" que j'ai pris conscience qu'il y avait un problème. Depuis, j'ai essayé de trouver des alternatives, j'ai essayé le miel, le beurre de cacahuète, mais je sais que je ne suis pas à l'abri d'une rechute."

#LeManjarParlonsEn

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Ajoutez un Completo tomates-frites-avocat-mayo, le bonheur est complet.

 

Commentaires

  • Tim

    1 Tim Le 27/02/2017

    Ben maintenant on a plus le droit de faire vivre à nos papilles des moments de joie !?
  • Mam

    2 Mam Le 27/02/2017

    Bon c'est une histoire de famille alors je vais mettre mon grain de sel! Ça suffit ces histoires de drogue et tout et tout...soyez raisonnables qd même sinon je vais me faire des cheveux blancs moi!
    Trêve de plaisanterie ben Jonida connaît la recette du Manjar (ou confiture de lait) auquel tu as l'air bien accro mon Val!!! Pas la peine d'en faire passer de manière illicite... En tout cas tu en a fait flipper plus d'un... Arrête ton char!
    Vous me faite bien rire avec vos commentaires les zozos!
  • Val

    3 Val Le 27/02/2017

    La blague avec Pikachu, j'ai pas osé la faire... j'attendais voir qui allait avoir le courage de la sortir !
    Luc, merci pour ta petite philo du soir ☺ Quelle soirée mouvementée tu as eu :p Finalement elles sont brossees ces dents ? That is the question...
    Tkt Clo je suis sur un gros coup avec un passeur pour l'introduire en France. Faut juste pas que la gauche passe, pcq avec la légalisation et tout ça, ca va faire s'écrouler le marché
  • Tim

    4 Tim Le 26/02/2017

    Ne te fais pas de soucis pour Val et la drogue : tu parles à un initié avec la coca...
  • Clo

    5 Clo Le 26/02/2017

    Une forêt remplie de limace : le pieeeeeeeeeeeeeed ça fait un matelas massant pour le dos !!!
    "si la vache passe, Val passe" => Mythiiiiiiiiiiique ! Mais t'as pas tord franchement =D
    Sérieux Val, tu parles le Belge ? Il est fou mon frère.
    Pfffffff, le Cerro Picacho, c'est peanut à côté de la Dibona... Moi j'dis, j'vois pas l'intérêt d'aller dans les Andes pour ça =D
    Val, tu partages en terme de drogue j'espère... ?
  • Tim

    6 Tim Le 20/02/2017

    Alors Lucky on coince sur les cimes de l'Oisans ? C'est pas tout de connaître la dibo, les dolo et les spigolos comme on dit : ceux qui ont le moins de confiture coing sont ceux qui l'étale le plus
  • Guy

    7 Guy Le 20/02/2017

    Je l'avais toujours su ! C'était évident ! Je n'ai pas seulement marqué l'Histoire de l'Europe, mais aussi de l'Amérique ! El Emperator Guillermo ;)
    "Le bel anticyclone", parle pour les skippers du Vendée Globe qui les fuient sans cesse (tu as raté les derniers pour deux petites semaines, battu sur la ligne !).
    "Far over, the misty mountain rise, leave us standing upon the heights" ... What ? 6 ans de mathématiques n'ont rien arrangé ^^
    Picacho, Pikachu, on voit où sont aller se servir les faiseurs de sous occidentaux...
  • Lucky

    8 Lucky Le 20/02/2017

    Tiens, ton Manjar m'a donné l'envie de tresse au crunchy Ovomaltine. Non, finalement, je vais ouvrir une gelée de coing... Il est bien tard, mais je ne me suis pas encore brossé les dents...
  • Lucky

    9 Lucky Le 20/02/2017

    La photo du Fayard (ou d'un de ses cousins) est splendide ! Les autres aussi, d'ailleurs ;-) La cascade du glacier du Queulat rappellent Gavarnie, le Picacho, la Dibona, las Torres, les Dolo et leurs spigolos, mais la cime de l'Oisan, j'ai du réfléchir un bon bout de temps... bouh !
    Alors que l'on tente de se rassurer, en faisant coller les nouvelles splendeurs qui se déroulent sous notre regard au connu et aux souvenirs, laissons nous aussi imprégner par l'ambiance et émerveiller par la beauté nouvelles. Que cette médiation aide notre âme à se renouveler.
    Merci pour tes photos et commentaires enrichissants !!!

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